La Suisse sous “Contrat Helvétique”
En vadrouille en Suisse, mes invités étrangers restent souvent perplexes. Ils s’interrogent sur cette mystérieuse étiquette blanche aux deux majuscules “CH”, arborée à l’arrière des autos indigènes.
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J’explique l’air savant qu’il s’agit du nom latin et historique de notre pays: la Confédération Helvétique. Un peu comme l’appellation scientifique d’une plante rare.
Mes cousins new-yorkais comprennent vaguement. Ils ont entendu parler de fédéralisme. Ma tante espagnole, monarchiste, pas du tout. Ma parenté slovène s’en fiche allègrement. Pour elle, seule compte la beauté des Alpes qui lient nos deux peuples.
J’insiste sur l’importance de cette ellipse autocollante et facultative. Elle représente mieux notre pays que les perpétuels clichés lacs, montagnes et stations de ski huppées. “CH” signifie d’abord et avant tout “Contrat Helvétique”. Celui qui affiche ces initiales a signé le contrat de la suissitude. Tout comme les pères fondateurs ont paraphé la charte créant la Suisse en 1291.
Explicite ou tacite
Un exemple pour ma tante andalouse. Chez nous, après 22h00, finie la fiesta. Cette obligation figure dans le règlement au bas de l’immeuble. Si tes voisins dérangent passé ce délai, tu peux appeler la police. Cette règle du calme s’applique partout: dans l’ascenceur, dans les transports et les lieux publics, dans les bureaux. Au pays des assureurs, rien ou presque n’échappe à quelque clause contractuelle, explicite ou tacite.
Il en va ainsi des rapports humains, de la distance entre les villas, des ères de jeux. Idem pour les relations entre élus locaux et fédéraux, l’étiquetage des poubelles, le nombre de lits vides dans ta maison de vacances ou encore la teneur en composants allogènes dans le chocolat ou les montres.
Tous les habitants du pays ont en principe signé le contrat. D’où ce sentiment d’être en Suisse à l’abri de tout et de rien. Des attentats terroristes, des ouragans, des pénuries énergétiques, des pick-pockets, des grèves ou de la corruption et des moustiques zika. Peu de mauvaise suprises donc. Mais peu de bonnes aussi. Dommage.