Les vacances dans les vignes, une activité encore balbutiante en France
Parlez d’oenotourisme autour de vous: une bonne moitié de vos interlocuteurs vous regardera avec des yeux ronds. L’activité se développe en France depuis cinq ans.
En France, le tourisme viticole ne connaît de réel développement que depuis environ cinq ans. Pourtant, La Route des vins de Bourgogne existe depuis les années 1970, celle des vins d’Alsace depuis 1953. Élevé au rang d’industrie en Australie et en Californie, où les fameuses “wineries” de la Napa Valley attirent près de 20 millions de personnes chaque année pour un chiffre d’affaires évalué à 300 millions de dollars, il a depuis longtemps convaincu nos voisins espagnols, portugais et italiens.
Heureusement, la France pourrait bientôt combler son retard. Car la filière vitivinicole, globalement en crise, semble avoir pris conscience des multiples avantages de l’oenotourisme: augmentation des ventes en direct à la propriété, diversification des sources de revenu et fidélisation du client. Un marché au potentiel énorme pour un pays comme le nôtre, qui voit passer 76 millions de touristes chaque année.
>>A voir, un reportage de France 24 sur l’oenotourisme:
Art, gastronomie et vin, un mariage de raison
Jean-Michel Cazes, propriétaire du grand cru classé de Lynch Bages, à Pauillac, a développé Bordeaux Saveurs dès 1989, une entité regroupant notamment le Relais & Châteaux de Cordeillan-Bages, aujourd’hui dirigé par Thierry Marx, l’École du vin, une école de cuisine, une agence de voyage spécialisée dans les séjours thématiques autour du vin et le village de Bages. Une ruine il y a encore deux ans. Au-delà de sa passion pour les vieilles pierres, l’homme a compris qu’il devait replacer le produit dans son environnement et le croiser avec d’autres univers comme la gastronomie ou l’art.
Associer art contemporain et vin, c’est aussi la démarche de Philippe Raoux, dont le Château d’Arsac est désormais un musée à ciel ouvert abritant les oeuvres de Niki de Saint Phalle, Bernard Pagès ou Jean-Paul Raynaud. Un concept novateur en 1986, quand l’homme a racheté la propriété, mais qui a, depuis, fait des émules. Cet été dans le Var, par exemple, dans le cadre de la 9e édition d’Art et Vin, 61 caves particulières accueilleront chacune les oeuvres d’un artiste.
>>A voir, une vidéo de présentation du Château d’Arsac:
Des complexes oenotouristiques comme outil marketing
Mais Philippe Raoux a toujours un temps d’avance. Il vient donc d’ouvrir la Winery, un complexe oenotouristique d’envergure posé à l’entrée du Médoc sur un parc de 26 hectares. L’édifice en verre propose 2000 références de vins français et étrangers dans sa boutique, un restaurant, un auditorium et des spectacles. Les visiteurs peuvent aussi prendre connaissance de leur “signe oenologique”, via une séance de dégustation de six vins à l’aveugle accompagnée de dix questions, censée déterminer leur caractère. Une manière ludique d’orienter ensuite le client vers les vins qui lui correspondraient le mieux…
C’est un formidable outil marketing et de fidélisation, reconnaît le fondateur. Notre but premier n’est pas de vendre immédiatement, sur place, mais d’alimenter notre fichier clients, de trouver les goûts de chacun.
Une initiative privée qui ne l’empêche pas de travailler main dans la main avec les offices, comités régionaux et départementaux du tourisme. C’est ainsi que le Château d’Arsac (Médoc) se retrouve inclus dans le circuit “Art et Vin, itinéraire d’un amateur en Médoc”, l’un des sept circuits clefs en main proposés par l’office du tourisme de Bordeaux. En même temps que la création de deux postes dédiés à l’oenotourisme il y a trois ans, l’office bordelais s’est aussi doté d’un comptoir spécifique pour aider les visiteurs à construire leurs vacances dans les vignes.
Des initiatives pour attirer une clientèle avide d’originalité
La plupart des régions, de même que les comités interprofessionnels du vin, développent circuits, guides, chartes d’accueil. Ainsi, Inter Rhône vient de publier le guide Tourisme et vignoble en vallée du Rhône qui recense les 421 caveaux adhérents à sa charte “Côtes du Rhône, terroirs d’accueil”. Une base de données complète que l’on peut retrouver sur leur site Internet.
Le comité interprofessionnel des vins de Bourgogne a lui aussi édité une carte de la Route des vins recensant, au dos, les 300 membres adhérents à la charte d’accueil de Vignes en caves. Autant d’initiatives nécessaires, mais certainement pas suffisantes pour attirer une clientèle toujours avide d’originalité. “Les gens nous demandent souvent des produits qui n’existent pas encore”, souligne André Deyrieux, créateur du premier site consacré à l’oenotourisme qui enregistre déjà 1000 visiteurs par jour, moins d’un an après son lancement.
>>A voir, un tutoriel pour réussir son projet oenotouristique: