Ma Suisse à moi

Monsieur Sourire, mon drôle de bonhomme

Johann Schneider-Amman © xyz
Certains clichés sur les Suisses ont la peau dure: on mange de la fondue, se goinfre de chocolat, on parle len-te-ment, on a des grosses voitures et des belles montres. Mais j’ai appris il y a peu, de l’aveu même d’un compatriote, que les Romands étaient des petits rigolos. Sérieux?
“En Suisse romande, c’est toujours rigoler, jamais travailler” m’a dit l’autre soir un ami Suisse allemand. Si Yann, Catherine, Annick et Alexandre qui courent les petits jobs pour boucler leurs fins de mois l’entendaient, ils lui planteraient volontiers un paquet XXL de Zweifel dans la bouche pour le faire taire. Mais tous les mercredis à 19h30, je dois bien me rendre à l’évidence, mon pote bernois a raison: en Suisse romande, certains savent rigoler.

“En Suisse romande, c’est toujours rigoler, jamais travailler”

Au bas de mon immeuble se trouve l’atelier “Rire en coeur”. Une fois par semaine, une cinquantaine de personnes – hommes, femmes et enfants – se réunissent pour échanger sourires et compliments. Entre eux. Comme ça. Gratuitement. Juste pour se faire du bien. Lorsque l’ambiance est à son comble, je les entends même mourir de rire. C’est la fête des zygomatiques.
Une fois la séance franche rigolade terminée, c’est une déferlante de bonne humeur qui envahit ma rue. C’est comme ça tous les mercredis à 19h30 précises. Les gens heureux semblent ponctuels. Je me penche alors à mon balcon. Tous se félicitent, se donnent des tapes dans le dos, se remercient pour ce moment partagé. Puis chacun rentre chez soi. Sauf lui. Mon petit vieux. Mon Monsieur Sourire. Et toutes les semaines c’est le même rituel: il s’assied sur ce banc jouxtant la fontaine, il y trempe son bras jusqu’au coude avant de se rafraîchir le visage du bout des doigt. Il reste là de longues minutes sans bouger, le sourire toujours figé. Une statue de chair sur ce banc de bois. Ce n’est que lorsque le crépuscule vient qu’il part: il ramasse sa canne, se lève doucement, jette un dernier regard amusé à ma fenêtre, me salue d’un geste de la main et s’en va, en souriant.
J’ai appris que le fait de se retrouver à plusieurs pour rigoler portait un autre nom que “repas entre potes”. Ca s’appelle la rigologie. Ca m’a fait marrer. Alors je partage.
 
 
 
 
 
 

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